A la page

petisaintleu

Je lisais hier un article sur l'off-the-grid qui consiste à vivre de manière totalement autonome. Jusqu'ici, je ne me suis jamais posé la question de savoir si j'en avais l'envie et la capacité.

Parallèlement, je me suis rendu l'après-midi à ma seconde et donc, j'en suis convaincu, à ma dernière séance d'hypnose pour ancrer définitivement l'arrêt de la cigarette. J'en suis ressorti en me disant que, si je suis capable de mettre un terme à vingt-cinq ans  de dépendance nicotinique, je suis en mesure de réaliser un tas d'autres choses.

Avant de m'endormir, j'ai un peu glandé devant la télé. Prétextant la nuit des étoiles, il y avait une kyrielle de programmes qui traitaient de l'infinité de l'univers, de sa complexité et par conséquent de la relativité de l'humanité.

Tout était réuni quand je fermai les paupières pour qu'une synthèse ne vienne m'halluciner au petit matin. En émergeant de mon sommeil, je réalisai que je ne m'étais pas réveillé dans de telles dispositions depuis une éternité. Les enfants sont depuis une semaine chez leurs cousins en Bretagne. Adélie n'a guère eu le plaisir de me tirer de ma torpeur par un « léou ?? » m'annonçant que la chasse à la Griotte est ouverte. Je ne sais pas si Célestin a remplacé son « Papa, papaaaaa, faut que j'te dise » par Tonton.

Mon esprit a donc pu se rendre directement à l'évidence. À quoi bon se crever à courir derrière des illusions perdues d'avance ? Des lectures m'avaient pourtant alerté : 1984, Le Talon de fer, Invitation au supplice ou Le Château. Sans doute n'avais-je pensé qu'elles n'étaient que littérature, sans chercher à aller plus loin que le bout de mon étonnement.

Peut-être n'étais-je pas mature pour recueillir les fruits défendus par mon esprit pétri d'idées réactionnaires, bien que je m'en défende au travers de ma soi-disant liberté et de ses garde-fous qu'est par exemple ma provocation.

Et si la vie, c'était cela ? Le luxe de ne dépendre de rien ni de personne ? Pourquoi nier l'existence en prétextant qu'il s'agit là d'utopie gauchiste d'un autre âge ? Moi qui me refuse de prétendre être le jouet de quiconque, n'ai-je pas dégusté jusqu'à la lie de me faire traire par des doigts graisseux nourris au profit dont je suis un infime rouage ?

J'ai compris et je n'ai plus peur ! Si demain je perds mon travail, ce qui est assez probable à courte échéance, je ne jouerais pas ma pleureuse. Je saisirais la balle au bond pour tourner la page. À moi de réfléchir à tout ce qui s'ouvrira comme opportunités. Pourquoi ne pas prendre de la hauteur ? Je trouverai, chez Aux Chiants on m'a appris que quand on veut on peut, un chalet paumé dans des alpages. Pas trop éloigné quand même

 La première étape de la décontamination pourrait s'axer sur les outils de communication. Adieu,  ver, virus et chat. Si je devais avoir recours à la toile, plutôt que de me faire prendre à son piège, je ferai appel à un voisin. Je me proposerai, dans le cadre d'un système d'échange, d'animer les longues soirées d'hiver au coin du feu, qui le seront d'autant plus quand je déclamerai jusqu'à l'aurore tout mon cheptel de blagues. Elles ne font rire que moi où mon fils quand je le menace de lui interdire Gulli. Ça deviendra compliqué, vu que je compte aussi me passer de télé.

Jour après jour, je me détacherai d'Ananké pour, à défaut d'être le maître absolu de mon destin, ralentir le temps et profiter du rythme des saisons. Atterrir en douceur, amorti par le gazon des estives avec des sommets de sagesse en perspective, plutôt qu'à me prendre dans la tronche l'asphalte d'une voie sans issue, asthmatisant mon esprit.

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