Besoin de rien, envie de toit

veroniquethery

La trêve hivernale a commencé. Plus le droit de virer les indigents. Malheureusement, je n'ai pas eu cette chance. Mon proprio m'a jetée comme une malpropre, juste à la fin de l'automne. Salaud complet ce type ! Il ne m'a jamais supportée. A la moindre occasion, il tentait de me gifler. Pourquoi tant de haine ? Ben, peut-être parce qu'il est âgé. Les vieux, c'est facilement irritable. Toujours à grogner. Mais, voilà, on n'a pas toujours le choix. Faut dire que la crise du logement nous touche tous ! Se trouver un coin douillet n'est pas facile.Mais, là, c'était dur. Il n'a jamais réussi à me toucher, le bougre ! Faut dire que je suis agile, en dépit de mon âge. Non pas que je sois une vieille baderne, mais pas non plus de première jeunesse.

Bref, j'ai connu des moments pas faciles dans la vie. Allez, je vous raconte. Ça vous changera de vos petites histoires.

D'abord, mon squat chez un étudiant en philo ! Barbant le type ! Avec ses soliloques sur Nietzsche, Platon et Ricoeur ! Sûr que le barbon, il s'y connaît plus en ricard et quand il parlait de Dieu, c'était pour jurer et pas pour se demander s'il était mort ou pas. C'est pas un peu bizarre de passer sa vie à réfléchir sur un être dont personne ne peut prouver l'existence ? Pourquoi ne pas philosopher sur le monstre du Loch Ness ou sur le yéti ? Enfin, pour ce que j'en dis. De toute façon, avec lui, j'étais tranquille. Sauf qu'il avait un gros souci d'hygiène. Il perdait la notion du temps et oubliait tout. Bref, je l'ai quitté.

Pour un de ses potes. Pas très beau le gaillard. Mais, malin comme un singe. Il avait compris que son visage ingrat ne lui amènerait aucune meuf. Du coup, il s'était métamorphosé. Il avait adopté la barbe. Bien longue, qui lui mangeait tous ses défauts et son acné mal soigné. Un hipster ! C'est comme ça qu'on l'appelait. Ça aurait pu durer entre nous. En plus, il avait un goût très sûr en matière de repas. Que du bio ! J'appréciais vachement. Mais, notre liaison n'a pas duré ! Il passait sa vie dans la salle de bains, un coup de peigne par ci, un coup de ciseau par là. Et sa crème à l'huile d'amande douce ! Sans compter son baume à la menthe. Pfff ! Quelle odeur ! Toujours pendu chez l'esthéticienne aux gros seins.

J'ai atterri chez un facteur. Tout petit, avec un gros nez. Mais, sympa. On se faisait des soirées chips. C'était son met favori. C'est salé, mais pourquoi pas ? Malheureusement, il adorait la bière et je déteste l'odeur de la levure encore plus que celle de la menthe.

J'ai donc migré. Et je suis arrivée chez ce vieux barbon. Qui m'a fichue dehors. Il m'a jetée comme une malpropre. Près d'une poubelle, avec juste son chandail plein de trous. Salopes de mites ! Qu'est-ce qu'elles ont à bouffer la laine comme ça ! A cause d'elles, je me gèle.

Enfin, va falloir que je trouve un nouveau colocataire. Je jette mon dévolu sur le grand noir qui passe. Un petit bond sexy et je lui saute au cou ! Poilu et confortable ce petit chat. Hummm ! C'est…

Merde ! Qu'est-ce qui m'arrive ! Oh non ! Un collier anti-puces. Bande d'assassins !

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