Cartes postales de Dublin n°4

Richard Magaldi

BALADE A DALKEY

Loin de l'austérité des façades édouardiennes du centre ville de Dublin, de la noirceur de la Liffey, et de la foule d' O'Connell Street, le village de Dalkey se niche au sud de la baie, à seulement une vingtaine de minutes à bord du petit train du DART qui longe la côte. Par une belle journée de printemps (il faut croire en la chance) c'est la balade idéale pour découvrir cette carte postale irlandaise aux allures de Riviera.

Commencer par flâner dans Castle Street (il y a en fait deux châteaux), la rue principale et ses échoppes traditionnelles, particulièrement animées le samedi, en dégustant un café à emporter acheté à la boulangerie ou l'épicerie bio. La première rue qui s'impose est Coliemore, en descendant doucement au milieu des maisons typiques aux teintes un peu sucrées de bonbons, et qui vous offre son petit port de poupée, face au grand large agité de la mer d'Irlande. Balayée par les vents, l'île de Dalkey à la couleur émeraude se profile avec sa tour et sa chapelle en ruine, gardienne de la baie et fidèle aux paysages des légendes celtes. A la fin de l'été le soleil couchant se pose sur elle et l'illumine de cette lumière unique au pays d'Erin.

Plus loin sur Coliemore, le petit parc de Sorrento sur la droite offre un point de vue à ne pas manquer sur la presqu'île et les deux baies qu'elle sépare, Dublin et Kiliney. En rejoignant Vico road, on ne sait plus très bien, de par la végétation et le nom des grandes demeures qui la surplombent, si l'on est près de Naples ou de Dublin. Palmiers, mimosas, pins, eucalyptus balancent leur silhouette alanguie sur la corniche irlandaise. La mer en contrebas, souvent à l'abri du vent, y semble endormie, si le soleil est au rendez-vous, sous des airs de Méditerranée. Il ne faut pas manquer, sur la gauche, le premier petit chemin qui, passant sur la voie ferrée, descend sur les rochers de Hawk Cliff. Là, à la première rambarde, en scrutant bien la surface des flots, vous pourrez peut-être apercevoir les nageoires des deux dauphins qui semblent monter la garde sur toute la largeur de la baie.

La petite baignade aménagée en contrebas dans les rochers de Hawk Cliff est un lieu très prisé des locaux qui, de janvier à décembre, vent ou pluie, viennent nager courageusement sous les yeux incrédules des touristes emmitouflés. Il est vrai que sous un rayon de soleil, le lieu est propice à une halte lecture ou tout simplement repos. En reprenant sur Vico, le choix est de redescendre sur la petite plage de White Rocks, ou de remonter par le parc de Kiliney pour un nouveau point de vue magnifique sur tout le sud de Dublin. Si au passage quelques groupes de jeunes filles espagnoles vous demandent avec excitation « Donde esta la casa de Bono? »,vous pouvez lez inviter à suivre la route jusqu'au grand portail de la maison du chanteur, décoré de graffitis et de déclarations en toutes langues d'amour incommensurable et éternel à son égard.

Le retour sur Dalkey peut s'effectuer par le parc et ses falaises à escalade, pour rejoindre toujours en flânant le petit port de Bulloch, où vous pourrez si l'envie ne vous refroidit pas trop, tenter une sortie en kayak. Mais ne partez pas sans dire bonjour aux phoques qui pointent le bout de leur moustache sous les quais, et semblent vous jauger avec flegme et ironie.

La dernière halte qui s'impose, avant le retour par le DART, est au pub The Club, au tout début de Coliemore, pour admirer ses boiseries décorées, et surtout sans hypocrisie, déguster une inévitable bière bien méritée.

Les plus courageux pourront, pour profiter encore du calme et de la mer, rentrer par Sandycove et sa célèbre baignade « Fourty foot » sous la tour du musée James Joyce, pour faire durer une balade insolite et un peu hors du temps.

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