Deux tiens valent mieux qu'un

noorea

Synopsis : Jen est comme qui dirait mal barrée. Quand elle rencontre Mike, son séduisant voisin, elle tombe tout de suite amoureuse de lui. Ce qu’elle ignore, c’est qu’il est déjà avec quelqu’un d’autre. Lorsqu’elle l’apprend, elle décide de ne plus le revoir. Les mois passent. Entre temps, elle rencontre Vincent, acteur de théâtre. C’est le coup de foudre. Les deux amoureux vivent une relation sans orage jusqu’au jour où Mike refait irruption dans la vie de Jen. Ils tentent tant bien que mal de résister l’un à l’autre mais la tentation est trop forte. Commence alors une double vie pour les deux amants, mêlée de plaisir et d’angoisse. Entre péripéties rocambolesques et  drames, entre joie, sexe, et culpabilité, suivez dans ce récit, un tantinet immoral, les deux  relations de cette jeune femme moderne, qui va bien devoir choisir un jour l’objet de son véritable amour.

Chapitre 1 : Mike

Il marchait vers moi. Cela faisait un moment que je l’attendais, que je répétais chaque phrase dans ma tête, pour être sûre que tout soit parfait. J’avais préparé soigneusement ce que j’allais dire, presque jusqu’à l’intonation de ma voix, jusqu’à la gestuelle. Je prendrai un air sûr de moi, épanouie, le genre de nana qu’on a envie d’avoir dans son lit. Mes yeux se feront sensuels, et ma voix douce. Il s’approchait de plus en plus. Il me regardait. Voilà des semaines que je le croise, cet inconnu du quartier. Tout ce que je sais sur lui, c’est qu’il habite le numéro 464 de la rue des châtaigniers, juste en face de la mienne, qu’il  est méga canon, qu’il est le fils de la psy de ma mère, qu’il est top canon, et qu’il me dévisage à chaque fois que je le croise.

La première fois que je l’ai remarqué, c’était dans le bus. C’était une journée ordinaire, banale. J’allais voir ma copine Sylvia, une fille un peu tarée. Je suis montée, et j’ai senti un regard se poser sur moi. Quand j’ai tourné la tête, il était là, assis dans un coin. Il me dévisageait. Le fait que je l’ai remarqué ne l’a nullement gêné. Il continuait de me fixer. J’ai souri, et je dois dire qu’il m’a troublée. Il était magnifique, le genre de gars qu’on voit dans les magazines. En moins musclé certes, mais avec des yeux ravageurs. Le genre de gars mesdames, qui vous fait perdre toute raison, toute dignité, qui vous ferait vous mettre à quatre pattes sans hésitation. Je suis descendue de ce bus, et je me souviens que j’étais toute retournée. On s’est croisés plusieurs fois depuis, à des moments espacés. J’ai découvert entre temps qu’il s’agissait de mon voisin. La chance était-elle avec moi ? Et me voilà, aujourd’hui, plantée à un croisement entre nos deux maisons, bien décidée à lui parler. Je suis de nature très têtue. En l’occurrence, l’objet de mon obsession est ce beau blond du 464. Et j’étais bien décidée à le lui faire savoir. Pour me rassurer, je me disais qu’il ne me correspondait sans doute pas du tout. J’essayais de le démystifier. Après tout, il était peut-être complètement abruti, attardé mental, ou fan de Johnny Halliday. Si ça se trouve, il avait un cheveu sur la langue. Ou peut-être qu’il avait un tout petit zizi rikiki. Il est même peut-être puceau. Qui sait hein ? Il se rapproche, mon dieu, de plus en plus. Rah, maintenant, je l’imagine chanter du Johnny, c’est foutu.  Ressaisis-toi ma fille ! Je me lève doucement, le regarde. Il m’aperçoit, et je sens qu’il me reconnait. Je m’avance vers lui, il semble surpris. Je prends ma respiration, et sans m’en rendre compte, dis les phrases suivantes :

-          Euh… Excuse-moi ?

Il se retourne vers moi avec un sourire ravageur. Je tremble. Je transpire. J’ai chaud. Pour le « belle et fraîche », on repassera.

-          Oui ?

-          Ne serais-tu pas le fils de la psy Jeanne Boyer ?

-          Heu… Oui, c’est exact….

Blanc dans ma tête. Il a des yeux d’un bleu profond, bon dieu ce qu’il est canon ! Eh merde, je sais plus quoi dire. Catastrophe. Il attend que j’enchaîne. Mais bon dieu Jen, enchaîne !

-          Ah, dis-je maladroitement. Parce que, ma mère est une  de ses patientes.

Bordel de merde ! Je ne pouvais pas trouver autre chose ? Qu’est-ce qu’il s’en fout de sa mère ! Et encore plus de la mienne ! Pourquoi est-ce que je parle de nos mères ? J’aurais du lire « La drague pour les nuls » avant de l’aborder. Parler des mères est une des choses les moins sexys au monde. Des jours de préparation physique et mentale pour en arriver là, c’est triste. Il me regarde d’un air étonné. Il attend que je dise quelque chose. T’inquiète mon gars, moi aussi je me trouve conne en cet instant précis. Jen, fais quelque chose !

-          Je te vois souvent, et j’habite juste en face. Je me disais que ce serait bête de se croiser tous les jours sans se connaître. On est presque voisins après tout…

Voilà ! Quel rattrapage ! Sur le coup, je suis impressionnée. Par contre, il sourit, mais ne dit toujours rien. Pas très bavard le playboy.

-          Je m’appelle Jen, et toi ?

-          Mike, répondit-il.

-          Est-ce que je peux avoir ton adresse MSN pour qu’on puisse se parler un peu ?, dis-je sans réfléchir.

Je vais me buter. Trouvez-moi une corde, un flingue, n’importe quoi.  Sérieux ? L’adresse MSN ? J’ai quel âge, treize ans ? Autant lui demander son facebook et « le demander comme ami ». Je suis pitoyable. M’enfin Jen, qu’est-ce que tu me fais ? C’est tout moi ça. J’ose traverser la rue, aborder un inconnu mais je loupe la dernière phase. Pauvre fille. Heureusement, il a souri.

-          Je vais peut-être te passer mon numéro de téléphone, je pense que ce sera mieux.

Victoire ! Je vais défaillir. Dans ma tête, je danse la rumba sur « paris latino », mes bras font des va et viens. A l’extérieure, je suis passible, calme, distinguée. Avec le teint écarlate et le front en sueur, mais distinguée.  Il me sourit, et me note sur un bout de papier son numéro. Il me le tend et, en souriant toujours, me dit de l'appeler. Il se retourne et continue son chemin, tranquille, le pas décidé. Moi, je reste un moment plantée là comme une pintade trop cuite, repassant la scène devant mes yeux. Non mais qu’est-ce que j’avais l’air bête. Il faut dire que ce n’est pas mon genre de faire ça, aborder les mecs dans la rue. Mais celui-là, je ne sais pas pourquoi, il le fallait. Il y avait comme une attraction magnétique. On peut appeler ça les hormones, une envie irrésistible de lui arracher son pantalon et de croquer ses petites fesses. Ou appeler ça sobrement le destin. Toi pour moi, moi pour toi, etc. Peut importe ce que c’était, j’aimais ça. Première réaction féminine typico-logique après cet évènement : appeler les copines. J’ai évidemment téléphoné à Sylwia pour décrire la situation. « Allo, Sylwia ? Devine ! Je l’ai fait !... Non non, simple, même pas peur. Je suis allée vers lui, et j’ai été très directe… Mais oui, tu me connais, je suis comme ça… Je lui ai dis bonjour, et je lui ai dit que je voulais son numéro… Bam ! Oui, il me l’a filé ! T’imagines ! ». Le reste ne sont que des banalités, des cris et autres bavardages qu’il serait inutile de préciser. Il m’a rappelée le lendemain. J’avais peut-être pas l’air si cruche finalement. Il a proposé qu’on fasse une balade, le soir. Romantique. Il avait trente et un ans, j’en avais vingt-huit. J’ai découvert quelques trucs intéressants sur lui. Par exemple, il aimait le rap. Mauvais point. Très mauvais point. J’ai un a priori sévère sur les mecs qui écoutent des rappeurs avec une chaîne en or massif autour du cou, entouré de vingt filles à moitié à poil. Ca ne me met pas en confiance. Evidemment, on rêve toutes que le gars nous dise: ‘J’aime Cabrel, surtout les chansons « je l’aime à mourir » et « puisqu’on ne vivra jamais tous les deux ». Ca me donne des frissons ». Mais là, il y aurait un risque assez important qu’il soit homo. Bonjour la vieille surprise. Un coming back à 45 ans, quand on a déjà deux gosses et une belle maison, l’horreur. Donc, ok, va pour le rap. On continue. Bon point, il déteste sa mère. J’ai toujours pensé que je me marierai avec un mec qui ne peut pas blairer sa mère. Même si cela comporte également des inconvénients, à savoir les nombreuses nuits à devoir l’écouter se plaindre de sa situation familiale désastreuse, ça présente le grand avantage de ne pas devoir supporter la relation mère-fils ultra fusionnelle genre « je ne veux pas qu’on me vole mon petit poussin d’amour à moi que j’ai mis au monde toute seule comme une grande ». Autre bon point : il m’écoute vraiment.  Pas comme certains mecs qui font semblant de vous écouter pour vous mettre dans leur pieux, non ! Là, il m’écoute, ponctue ce que je raconte, et a même l’air de me comprendre et de trouver cela intéressant.  Etonnant. On a parlé toute la soirée. Et tous les jours suivants, durant une semaine. On parlait des heures entières. Il était beau comme un dieu, j’en bavais rien qu’à le regarder. Tous les soirs, j’avais cette envie furieuse de l’embrasser. Je rêvais de passer ma main dans ses cheveux et de l’attirer vers moi. A son contact, mon corps bouillonnait. Il arrivait qu’on se frôle doucement et à ce moment-là, je rêvais qu’il me saute dessus sauvagement.  Pourtant, tous les soirs, il me laissait là, avec mes espoirs. En effet, il n’était pas insistant. Même pas du tout. Tout le contraire. Il ne me faisait aucune avance directe, rien. Je ne voulais pas passer pour une addict du « c’est quand qu’on baise ? », mais il y a un juste milieu à tout. Etait-il à ce point romantique ? Ou vraiment puceau ? Il repartait dans la nuit, son magnifique sourire accroché à ses lèvres. Je n’ai su que bien plus tard ce qu’il cachait. J’aurais du me méfier évidemment. Car tout ceci, malheureusement, s’est passé avant que je sache qu’il était déjà avec Aline, et un an avant que je rencontre Vincent.  Pour faire bref, le bordel.

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