D'inconnu à l'autre

Möly

Texte avec écriture inclusive.

Ce matin, en prenant mon petit-déjeuner, l'envie d'écrire m'a prise. Je me réveillais doucement, sur mon balcon ; observant la vie s'agiter. L'agente d'entretien qui effectue ses tâches quotidiennes, puis deux personnes passent. Elles ne me voient pas mais je les vois. Elles cherchent l'entrée d'une résidence où on les attend sûrement. Les voilà qui entrent dans le bâtiment. En quelques secondes, j'ai eu le temps d'observer les deux individus : leurs vêtements, leurs attitudes, leurs physiques. Et comme je suis quelqu'une qui aime aller loin, très loin dans ses pensées ; j'ai même eu le temps de m'imaginer qui iels pouvaient être. Iels sont entré.e.s dans le bâtiment et je me suis demandée qui iels allaient voir et pourquoi. Et vingt ou trente minutes plus tard, iels sont ressorti.e.s et j'ai pu reprendre le fil de mes pensées « Iels ne sont pas resté.e.s si longtemps ? Venaient-iels visiter un appartement ? Récupérer un achat fait en ligne? Passaient-iels saluer brièvement des ami.e.s ? » Bref, une multitude d'hypothèses. Et puis en l'espace de quelques minutes, ces gens, ces inconnu.e.s ne l'étaient presque plus...

Non, bien sûr, je ne connais ni leur prénom, ni ce qu'iels font de leur vie, leur âge, où iels vivent mais à partir de quel point peut-on dire qu'une personne ne nous est plus inconnue ? Car au final, étant quelqu'un de physionomiste ; je serais capable de reconnaître l'un.e ou l'autre de ces deux personnes dans la rue en disant « Tiens je les ai déjà croisé ! » je les aurai donc « reconnu ». Est-ce qu'iels restent donc encore des inconnu.e.s ? Je ne les connais pas intimement mais je les ai déjà vu, croisé.

Au contraire, les « célébrités », les « stars » on les appelle aussi les « personnes connues ». Alors, connues oui mais de qui ? Comment ? On peut donc dire de ces personnes qu'elles sont connues parce qu'on détient certaines informations comme leur nom, leur activité parfois plus -merci les magasines d'informations people- donc au final si avec si peu d'informations on peut dire qu'on connaît tel chanteur, pourquoi ne pourrait-on pas dire que l'on connaît des gens que l'on croise brièvement ?

On passe du stade d'inconnu.e.s à connaissances, de connaissances à ami.e.s ou autres relations, voire meilleur.e.s ami.e.s ; ou proches. Terme qui en dit long sur la relation, et sur la proximité nécessaire pour affirmer que l'on connaît quelqu'un.e. Dans ce sens, c'est si naturel. « Évidemment que tu ne peux pas dire qu'une personne que tu as vu en bas de chez toi un jour, tu la connais. » Non, il faut un lien, un échange, puis entretenir le lien et l'échange et se trouver des affinités, des points communs ; un intérêt à cette relation. Effectivement, si on prend les relations sentimentales (j'inclus là dedans toute forme de sentiments : amicaux, familiaux, amoureux et autres), il faut les entretenir. C'est comme votre plante verte ou vos cheveux. Si on ne veut pas que ça meurt ou que ça casse, ça s'entretient. Quelle jolie métaphore, n'est-elle pas ?

Donc, je continue à ranger ces deux individus dont j'ai inventé la vie l'espace d'un instant dans la case « inconnu.e.s ». Mais alors...



...Quand l'inverse se produit. Est-ce qu'on peut ranger des proches dans la case « inconnu.e.s » ? Si l'on prend le raisonnement du début, pas tellement puisqu'on connaît des informations sur elleux, qu'on a créé un lien, un échange. Oui mais pourtant...

...Même si je n'affirme rien et si tout cela n'est que ma propre réflexion, mon regard tout à fait personnel sur les choses ; je crois que parfois des gens qu'on a connu et rangé dans la case « proches » peuvent être parfois recalé dans la case « inconnu.e.s », ou presque. C'est comme un bibelot qui décore votre appart, vous l'avez fièrement trouvé tel le Graal, vous l'avez mis en évidence sur votre étagère et vous l'adorez et puis un jour, il prend la poussière, vous avez l'envie, le besoin de changer et l'objet est remisé au fond d'un carton, au fond de votre cave. Quelle triste métaphore, n'est-ce pas ?! Et pourtant, je trouve qu'elle résume bien mes propos.

Il est arrivé à pleins de gens déjà, d'être extrêmement proches d'une personne ou de plusieurs et que, comme ce bibelot, un jour ; il se passe quelque chose qui vous pousse à avoir besoin de mettre un terme à une ou des relation(s). Bien sûr, ce n'est pas aussi simple que de remiser le vieux poste radio que vous kiffiez trop à la cave. Non, ça prend du temps, des années parfois pour classer le dossier. Pour ma part, c'est une étape très douloureuse que j'ai beaucoup de mal à encaisser. Comment quelqu'un.e qui a compté, qui a fait partie de votre vie, avec qui vous avez partagé, comment une complicité, des sentiments peuvent disparaître comme on refourguerait tous ses meubles sur leboncoin. Je ne le conçois pas. Du jour au lendemain, tout ça reste un bout du passé. D'accord, les choses changent, les gens évoluent. Mais que la relation en elle-même s'efface aussi vite qu'on efface de la craie sur un tableau, ça me sidère. (Oui j'adore les métaphores, je pourrais vous en faire à toutes les phrases mais ce serait un peu trop lourdingue j'imagine).

Seulement voilà, aussi difficile que ce soit, c'est souvent nécessaire pour tourner la page de mettre des gens qu'on aimait dans le carton des « inconnu.e.s » (je n'essaie pas de vous passer un message subliminal pour que vous re re re regardiez les trois frères. Même si ce film est culte. Re re re regardez-le alors.) Car finalement, comme je le disais plus haut avec une de mes métaphores ; une relation quel qu'elle soit, s'entretient. Et si l'ont dit « loin des yeux, loin du coeur », cet adage me semble plutôt vrai. On peut vivre loin et garder une amitié, tant qu'on garde un lien, un échange aussi infime soit-il. J'ai des ami.e.s qui le sont toujours malgré qu'il y ait pu avoir un éloignement géographique entre nous ; nous avons plus de moyens pour communiquer facilement maintenant (même si je trouve que l'autre versant de cette « facilité » à communiquer est malsaine mais je pourrais écrire un autre article sur le sujet plus tard).

La communication est la base de toute relation : se donner des nouvelles, rire, être franc, se livrer, faire confiance, donner de la confiance, partager ses sentiments, ses opinions. C'est le fait d'échanger qui nous unit, qui peut unir des cœurs. Car comment pourrais-je dire que mes meilleur.e.s ami.e.s le sont si jamais je n'avais ri ou pleuré avec elleux ? Si jamais nous n'avions pu nous confier des choses intimes ? Il est bon des fois de juste se retrouver et ne rien se dire, mais la communication ne peut-elle pas aussi, de temps en temps, passer par des choses plus subtiles ?

Dans tous les cas, rompre l'échange et la communication mène à la mort d'une relation. Et amène à réaliser qu'un super ami n'est plus qu'un inconnu, que la personne avec qui l'on a été en couple ne nous connaît plus...et qu'on ne la connaît plus, non plus. C'est dur. C'est triste. Mais c'est vrai. On passe du stade inconnu au stade proche, comme on peut passer du stade proche au stade inconnu. Chacun.e ayant ses limites, ses croyances et sa sensibilité sur ce sujet mais voilà ce n'était que mon humble avis.

Je ne cherche pas à trouver de « réponse » car il n'y en a pas, c'est simplement une réflexion sur des moments de vie et je pense que beaucoup peuvent s'y retrouver.

Si vous souhaitez partager votre avis, n'hésitez surtout pas, au contraire !:)


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