Exposition

Christian Lemoine

Des regards s’opposent, où des corps reposent. La vue s’impose, l’œil transpose, la main dispose, l’œuvre s’expose. Les regards se croisent, comparent leurs horizons et les limites de leurs écartements. Il en jaillit des brêches peut-être. Des échappées sur des paysages d’abord incrédules, puis lentement débarrassés des écharpes brumeuses, des nappes de tulle soyeux, jusqu’à ce que se livre la vision parfois crue ou choquante. En voudrons-nous à la pierre de fondre d’un ciel transparent, libérée des glaces qui la retenaient, vers une vie soudain effacée ? N’en voudrons-nous pas aux lâcheries qui nous protègent, ces petites vilenies du jour, grimaçant dans les miroirs de nos salles de bain ? Sans pourtant déranger nos rêves de saisons balnéaires. L’un explore des paysages colorés, illusion d’un monde apaisé, tandis que derrière ses teintes pastels faussement douces grondent des engrenages qu’on voudrait ignorer. L’autre griffe des corps et des visages, évidences des violences itérées, jamais repues, alors que sous l’encre noire et les papiers déchirés tentent de germer des corolles épurées. Toiles et crayons se croisent, composent une polyphonie sur les discordances outrées, flattées de leur omniprésence. Pour l’Homme, la trace à imprimer vers d’autres perspectives ; Pour les hommes, l’espoir d’un langage partagé dessiné sur les lignes de leurs mains ouvertes ; L’ébauche d’une aube incertaine pour l’humanité.
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