Histoire de Gone.

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Gone

Texte avec une contrainte :

le début :   " L'annonce paraîtrait vendredi "    

le milieu : "question de temps libre"

la fin : "une délicieuse belle-mère"


" L'annonce paraîtrait vendredi "

Avait affirmé la secrétaire du journal gratuit paru vendu.

Gontran avait hâte de vendre l'immeuble fraîchement hérité du 8, rue des Genêts à Lyon, abritant l'appartement et le célèbre restaurant à l'enseigne du « Bouchon du cochon », dans lequel il avait passé ses primes années, entouré de ses parents décédés après une courte agonie, consécutive à un dîner de quenelles peut-être un peu vieilles.

Un mois après il empocha un chèque assez important pour lui permettre de prendre un congé ultra sabbatique.

Ce petit gone familier des traboules qui n'avait jamais quitté l'hexagone, se mit en tête de découvrir l'Amérique du nord avec son Chicago nœud gordien routier, son pentagone aux coques de béton, et sa Siligone valley.

Il s'installa à New York et tomba rapidement amoureux d'Anne, une expatriée, rhodanienne au roux sillon qui invitait à la position à deux chiffres.

Sous un ciel fréquenté par les drones, il ouvrit une charcuterie proposant des spécialités lyonnaises délicates et saines.

Deux ans jour pour jour après leur rencontre, Gontran et Anne se marièrent en cinq minutes, au grand dam de la mère de sa mie qui aurait souhaitée une grande fête.

La cigogne leur apporta une petite Annick qui coula au sein de ce foyer, situé prés de la banque Ease, une bébéance des plus douces. 

La vie allait pour le mieux jusqu'à cet accident de la circulation sur la soixante-neuvième avenue qui le força, membre inférieur cassé, à lever le pied.

Durant qu'Anne tenait la boutique, il fréquentait en béquille des quartiers de la grosse pomme qu'auparavant il avait ignorés.

Avec sa jambe plâtrée, il aimait rester des heures assis sur la même chaise, à Central Park et regarder les femmes passer, bien plus longuement que jamais auparavant. "Question de temps libre", pensait-il.

Alors qu'Anne éreintée par son double labeur ne pouvait que le négliger, ses gonades pointant au pôle emploi depuis longtemps commençaient à le tourmenter.

Alors, il se lia à Bégonia, une jeune colombienne, pas pressée, ancienne mule en cavale, sosie de Bardot années 60, une incertaine et dissimulée idylle heureuse en naquit.

 Il prit la diagonale et Anne ne le vit plus venir.

Ayant perdu son divorce, Anne le déposséda de son commerce et Gontran se retrouva bientôt seul, arpentant un polygone jonché d'épaves vivant le cauchemar américain.

Il en voulait à la mère possessive et manipulatrice d'Anne qui l'avait totalement spolié à l'aide de faux témoignages, car même s'il avait trompé sa fille, il pensait bénéficier de circonstances atténuantes et de plus, il se retrouvait privé de son Annick.

Avec ses derniers dollars il vivotait avec un ancien combattant de l'Argonne surnommé Go on, dans un égout désaffecté, meublé style hard Emmaüs.

Il lisait de plus en plus de romans noirs trouvés dans les poubelles et commençait à regarder la dernière relique de son passé : sa feuille au fin tranchant avec un autre œil.

Il songea à devenir l'épigone de ses héros mais en rajoutant cette french touch encore appréciée dans ce coin.

La vengeance est un plat qui se mange froid, ruminait-il de plus en plus. 

Il échafauda un terrible scénario fixant sa haine sur cette vieille Gorgone d'ex-belle-mère.

Dans son antre il l'attira, la tua, et en tablier la transforma en un festin typique de son terroir qu'il partagea avec son compagnon sapeur terrorisé.

Bien préparée elle devint une délicieuse belle-mère.                                                                                

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