Light my fire

L'hirondelle

Après cette journée écrasante de chaleur, nous nous sommes réfugiés dans la pénombre de la chambre. Installés autour du guéridon en fer forgé, nous parlions d'amour et de civilisations. L'air lourd du soir pénétrait la pièce par la grande porte fenêtre entrebâillée. Les voilages en mousseline blanche entretenaient une danse lascive qui nous berçait en fond. J'aimais t'écouter. Je buvais tes voyages et te caressais du regard. Tu me partageais tes expériences, les faisant défiler de ta voix caverneuse. Je piochais parfois un fruit dans la corbeille posée là et distraitement je profitais de son suc gorgé d'arômes et de sucre. Je ne ratai pas l'instant où ce geste, plus qu'un autre, te perturba. Le rythme de ta voix ralentit et tes yeux accompagnèrent mes doigts à ma bouche...

Alors un éclair de lubricité traversa mon regard et un sourire grandissant, carnassier, s'épanouit sur mon visage. Ayant saisit ta réaction au vol, quelques perles de ce jus coula sur mon poignet.

Nous ressentîmes tous deux cet embrasement de nos êtres, bien que rien n'aurait pu être décelé par un regard extérieur. Nous nous faisions face, immobiles, à saliver des promesses que Satan faisait miroiter dans nos yeux.

Et puis je rompis l'hypnose sans me dégager de tes yeux. Le fuit du pécher toujours entre mes doigts, je portai mon poignet à ma bouche pour aspirer les gouttes fautives. Mes lèvres à son contact me firent fermer les yeux de plaisir. Je me délectais de cette tension qui envahissait mon corps, sachant pertinemment qu'il en allait de même pour toi. Je m'amusais divinement de ces préliminaires et comptais bien en payer le prix tout bientôt. Ma langue effrontée suivit mon pouce. J'esquissais de croquer à nouveau dans cette poire mûre à souhait.. quand tu me saisis ledit poignet, l'éloignant d'un coup sec. Aucun sourire dans tes yeux charbon, rendant le mien plus allègre encore. Ta seconde main vint soutenir mon coude, et me pénétrant de ce regard dont tu as le secret, tu mordis généreusement dans la chair, embarquant mes doigts dans ta bouche avide.

Complètement électrisée par ce geste, par le ressenti de mes phalanges dans cette chaleur, tu m'embarquas sans ménagement pour me laisser glisser près du lit. Adossée contre son flan, ce sont mes cheveux que ta main empoigna pour mieux presser ton entrejambe contre mon visage. Encore enfermé dans ton pantalon, ton membre raidi me faisait déjà haleter d'excitation. Mon air narquois, presque enfantin, pendant que mes mains s'affairaient à te déboutonner et défaire tes entraves. Je n'eus pas le temps, d'espérer quoi que ce soit, que tu enfournais franchement ton sexe. Ma bouche était une fournaise. Un préambule du Vésuve, en pâle imitation de mon vagin. Tes assauts volontaires donnaient le pas. Crispée par la respiration coupée et l'amplitude de ton mouvement, je me détendais pourtant, soupirais d'aise intérieurement. Tu possédais ma bouche, laissant le reste absolu de mon corps en frustration. Mais je ne pouvais que saliver de la bouche, quand ta quête était celle du Graal.

Alors nos corps bouillonnants, tu t'agenouillas pour fondre sur mon visage. L'encadrer de tes paumes et m'embrasser tendrement. Profondément. Souffler le chaud et le froid, battre le fer à la manière d'Héphaïstos. Me faire danser en contrastes pour que nos repères s'envolent en fumées épaisses. Je me raccrochai au lit comme on tente de garder la tête hors de l'eau, salace. L'une ou l'autre de tes mains, petit diable, rejoignit mon antre aussi gorgée de jus que l'était cette poire. L'autre me caressait de la nuque à mes seins, avant de s'ancrer dans ma main, doigts mêlés. Crocheteur de verrous, tu fis parfois taire mes gémissements par des baisers. Le sexe féminin est d'une telle géographie... Tu investis chaque recoin, caressas chaque paroi. Te retins aux moments propices et continuas inlassablement à d'autres, infernaux. Ni mes supplices, ni mes larmes te dissuadèrent de tes fins. Je convulsais un nombre de fois.. qui me fit perdre le décompte, anéantissant ma raison. J'approchais parfois de l'épuisement et tu refrénais ton exploration, avant de repartir de plus belle...

Et quand bon tu l'auras voulu, vint le temps de ma pénitence ultime. Force de mots chuchotés à mon oreille, tes envies dévorantes me firent me placer à genoux sur le lit. La croupe offerte en reddition. Mes chairs gonflées, à vif et débordantes de plaisir pur, exposées à ta vue. Un souffle léger, quelques caresses externes, m'arrachèrent des cris d'impatience étouffés dans la couverture. J'en étais à prier les enfers quand tu présentas ton gland à l'entrée des portes de l'extase.


Pourtant, tu ne te décidas pas à m'achever. Encore un instant. Encore un tourment. Et d'une main tu guidais ton membre sur toute la longueur de cet entrebâillement, en grands allers et retours, de mon clitoris à mon anus. Tu traçais là une ligne de feu, m'incitant à m'ouvrir d'autant plus. Transformée en succube captive, je margotais, je feulais pour que tu viennes à moi. Mon bassin oscillait de petits mouvements pour t'appeler en désespoir.

Tu jouais avec moi comme le démon à ressort sortant de sa boîte. Imprimant de petits cercles, me laissant croire que tu t'enfonçais. Perdue de désir, j'échappai un cri quand enfin tu me pénétrais.



« Il faut oser. C'est un jeu où il n'y a ni perdant, ni gagnant. Seulement une communion. »


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