L'incendie ridicule.

flolacanau

« Quand tu es angoissé, tu devrais écrire, ça te ferait du bien, je suis sûre »

Je sais qu'elle dit ça pour m'apaiser et j'aimerais bien que cela fonctionne, mais, d'emblée, j'ai l'impression de tenter un truc idiot du style : si tu te brûles, cautérise avec un tison !


Y a des kilos de plomb en équilibre sur mon plexus solaire, Ils ont dû fuir le crâne, semblable à la montagne sainte victoire subissant la défaite d'un incendie ravageur : neurones grillés cendres en suspension et spectacle apocalyptique. Sapeur de moral qui n'éteint rien sinon l'élan vital.


Dans l'errance sédentaire, je ne supporte plus la moindre contrariété. Un Sisyphe à la petite semaine, cage thoracique étrécie, poumons asthmatiques, la moindre démarche m'épuise, la moindre action entamée me hurle d'abandonner tout, là tout de suite. Je mange sans plaisir, dors sans sommeil et ne parle avec personne. Je pleure sans raison immédiate aussi, juste avant d'en trouver des tas. Y a rien de plus assommant qu'un mec qui se plaint, même si poliment, on prétend le contraire.

Au-dessus de la tête, y a un assortiment de trucs de chez Damoclès, orfèvre en matière d'emmerdes. De l'administratif, des retards, des factures des oublis et une jolie faux pour me piquer le peu de blé qu'il me reste. Pendant ce temps-là, je prépare mon déménagement, dans les cartons, ma future demeure un jour, qui sait ? Je prends l'idée, l'explore, l'agrémente de détails tortueux et douloureux et me dis qu'il vaudrait mieux disparaître avant que le noir complet ne m'engouffre. J'étais un de ces gosses qui devaient avoir une veilleuse, un mini phare dans la nuit, pour ne pas que l'univers se disloque dans l'obscurité. Mes monstres étaient déjà là, prêts à bondir, à me mordre, me déchiqueter, à se disputer ma dépouille en succions horribles. Ils ont pris une autre forme, plus insidieuse ; ils opèrent de jour, à l'intérieur, comme un cancer. Ils endorment la partie qu'ils grignotent, me creusent, me vident.

« Ne te plains pas mec, t'as un toit sur la tête, de quoi bouffer, et tu ne dois pas lever les yeux au ciel en permanence pour vérifier si une bombe ne te tombe pas sur la gueule. Relativise, quoi ! »

C'est vrai , et c'est ce que j'essaie de faire. Ça me pompe le peu d'énergie qu'il me reste au cœur de l'angoisse. Cette impression de rendre les armes pour un combat minuscule ne rend pas les choses plus simples. On passe du drame au ridicule, à l'absurde et ma raison s'y abîme tout autant.


Alors, écrire mes angoisses ? comment dire... Peut-être, mais après-coup, quand les cendres seront froides, parce que pour le moment, rien ne vient sinon le goût du gâchis et de l'échec.

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