Partie 17

Soda Pop

Harald 1er Blåtand « à la dent bleue » !

Nous nous redressons tandis que les Bonnasses écartent les voiles (et pas les compas !) de la litière. Nous avons hâte de découvrir le souverain des Mères du Grand Ch'Nord. Je ressens un petit pincement au palpitant. Les Couronnés parviennent toujours à me plonger dans un état de semi-transe...

Je regarde. Lance' regarde aussi. Nous conjuguons de conserve le verbe regarder (nous regardons, en fait !) Nous y mettons nos quatre prunelles, nous nous déplaçons sur nos orbites (sachant que seul Emile peut se déplacer sur sa bite !) tout notre individu s'irise. Je me coagule, me pétrifie, me solidifie, les gars. Ça me recroqueville dans mes intérieurs. Et je sens que ma bouche s'ouvre toute seule comme une huître au soleil...

Putain de moi, ce que je vois sur la litière du trône gigantesque, c'est pas un Roi, c'est une vache ! Pire : un éléphant, une baleine, un amas, un incoercible monceau de graisse charbonneuse. Il doit peser dans les 250 kilos, le Glorieux ! Il est monstrueusement flasque. Il s'étale, il se répand. Il est ignoble. Il est abjecte. Il n'a pas d'âge, pas de tour de taille, pas de formes. Ce n'est que volume et déchargement en vrac. Ce n'est plus pesable un machin pareil ! Imaginez une barrique de gélatine noirâtre. C'est énorme, hideux et ça existe... King-Kong en personne (plus Kong que King, ou alors King des Kongs, voire Roi des Kongs en Molière !)

Il s'affiche dans ses oripeaux impériaux, gonflé, herminé (1) colleretté de peau de Bâle (2)  le teint  livide, la bouche en cerise, avec ce regard noir désabusé du Bichon Maltais en train de déféquer. Sa bouille est mafflue, triple-mentonnée et ses narines tellement béantes que les otorhinos du coin doivent de fringuer en spéléologue pour lui mater les végétations. Des dents écartées semblables à des crocs protègent une langue follement écoeurante. Des touffes de poils jaillissent de ses naseaux et des ses portugaises : Il ne doit pas beaucoup les faucher car elles abondent pareil à la mauvaise herbe d'un champ à foin oublié. Il n'a pas de cou et ses oreilles font penser à deux champignons comestibles ou à deux anus en fleur. Bref, une allure de primate que l'on devine velu, plus proche du paléolithique que du crâne de Yul Brynner. Ajoutez à ce tableau des petits bras en ailerons de pingouin, et vous obtiendrez l'être le plus terrible, le plus monstrueux qui se puisse engendrer.  Une couronne en or Mastiff (3) achève de transformer le bonhomme en Impérator à durée limitée.

Ouffffff...Un viking d'origine Congolaise provenant de Belgique, dont l'aspect rappelle celui d'un gros Gille du Carnaval de Binche, ça vous la coupe ! C'est Mardi Gras !

M'es avis qu'il doit avoir un hippopotame dans sa descendance. Un gorille aussi, sûrement. Et peut-être à quelques générations de là, un cachalot.

Le Roi baille démesurément, ce qui permet une vue panoramique absolument imprenable sur sa dent bleue turquoise, ses poumons, son pancréas, son gros côlon et son intestin grêle. Puis, il nous dévisage dans son regard taillé dans la masse. Je me force et prends l'initiative :

-       Je vous prie Votre Majesté de bien vouloir agréer l'hommage de notre plus profond respect, récité-je mielleusement.

Il nous octroie un nouveau regard, plus pesant que le précédent. Puis, ses Bonnasses se précipitent et l'aident à s'extraire de sa litière.

Sur pied, le monument est beaucoup plus terrifiant. Soutenu par les Bonnasses dont les petits seins nus nous agressent, il balance de sa voix caverneuse et du haut de ses 2,13m au bas mot :

-       Soyez les bienvenus une fois, à Aalborg, ma capitale ! Je suis heureux de vous y accueillir, Sir Emile Lion d'Aquitaine. J'ai été très touché par le présent que vous m'avez fait. Cette esclave ibérique est fort belle, une fois !

Je n'ai pas le temps d'émettre un seul point d'interrogation, que l'Obèse couronné au fort accent Wallon me tance du doigt :

-       Sans cadeau de votre part, vous seriez déjà empapaoutés en Couronne (4) une fois ! La faim tue en quelques semaines, la soif en quelques jours, le froid en quelques heures, mais une mauvaise décision tue  en quelques secondes !!!

Une énorme chevalière représentant un phoque en train de tromper sa femme avec un collègue, ornant son doigt inquisiteur, confirme le bien sondé (5) des appétits sexuels gargantuesques de l'Immense.

(à suivre)


(1). du verbe herminer : porter de l'hermine !

(2). la Bâle : de la famille des Mustélidés. Importée ici d'Helvétie pour élevage. Cousine de la Belette pygmée, c'est un petit rongeur extrêmement rapide et vif, et dont le pelage rappelle celui du vison. Les grands Souverains d'Europe s'enorgueillissent d'en revêtir et ont pour habitude de le clamer haut et fort : « c'est d'la Bâle ! »   

(3). or massif, dont l'apparence lourdingue en impose comme le molosse romain à quatre pattes qui combattait les grands fauves dans les arènes.

(4). La Couronne, est une pièce d'horlogerie, dans laquelle s'introduit l'énorme tige du remontoir. On suppose que le Roi Harald insinue ici une pratique viking d'accouplement féroce et non répertoriée dans le Kâmasûtra ! En effet, quel intérêt aurait-il d'évoquer la monnaie officielle du Royaume du Danemark et du Groenland, sachant que bien qu'associée au grand Serpent monétaire Européen la Couronne Danoise n'impressionne plus personne ?

 (5).Le bien fondé ! Le parallèle avec la partie de jambe en l'air de nos phoques était trop tentant.


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