Un Noël en rouge et blanc

Nadège

Noir, blanc, noir, blanc, noir, blanc, rouge. Très rouge. Comme du sang. Oui, c'est ça, du sang... Qui coule, qui s'écoule, qui découle de veines arides. Plus loin, des chants de Noël retentissent. « Vive le vent, vive le vent, vive le vent d'hiver... » Le cristallin des voix s'éteint peu à peu. Ils se déplacent sans doute pour aller mendier ailleurs quelconques pièces pour quelconque cause. Ça fonctionne toujours les mômes dans la rue, le nez rougi par le froid et la voix douce comme un carillon. Et ici, un couteau dans la chair, dans les tripes, ça gicle. Dans la chair, dans les muscles, ça glisse. Dans la chair, dans les joues, ça pisse... le sang. Magma de sang. Ça y est, il sourit enfin. On taille sur ses joues un sourire béat. Faisons abstraction des lambeaux qui découvrent sa mâchoire. C'est Noël aujourd'hui. Le bonheur est à la clé. Cadeaux, festins, festivités. Et beaucoup de viandes sur le bitume ce soir. Viandes déchiquetées, presque viandes hachées. Un message sur le portable : dinde farcie au menu. On s'en lèche les babines, on en bave d'appétit. On laisse l'imbécile heureux avec son sourire immense, artificiellement immense, éparpillé dans la ruelle. Sur le sol enneigé, les éclaboussures de la peinture humaine. C'est Noël aujourd'hui, un Noël en rouge et blanc.

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